Si la Gaspésie est souvent dépeinte par sa route principale entre eaux et montagnes qui offre des paysages à couper le souffle, elle est également le siège d’une richesse faunique inestimable à l’intérieur de ses terres. Renommée pour ses parcs nationaux, la Gaspésie, c'est également des territoires sauvages moins connus qui regorgent de panoramas et d'histoire.
La municipalité de Saint-Léandre dans la MRC de La Matanie ne fait pas exception avec les sentiers de la Grotte des Fées, arrêt touristique parfait pour les amateurs de nature. Le temps d'une entrevue, Gérald Tremblay, bénévole responsable du développement des sentiers, vous invite à découvrir ce lieu enchanteur et son histoire.
Claudy Rivard
Étudiant montréalais à l'époque, c'est la crise d'Octobre 1970 qui a poussé Gérald Tremblay à quitter la métropole pour effectuer un retour vers sa communauté natale en Matanie. Guidé par ses valeurs, cet écrivain amoureux de l'humain et de l'histoire s'implique activement dans sa MRC dès son arrivée. « C'est le contexte sociopolitique de l'époque qui m'a poussé à m'impliquer et à lutter pour revitaliser nos villages par divers projets. »
Parmi ses différentes implications, Gérald est particulièrement interpellé par le sort des 2 500 hectares de forêt publique de Saint-Léandre alors exploités sans restrictions. Dans les années 1995, il fait la rencontre de Léonard Otis qui travaille déjà à la valorisation de ce lieu naturel dans un désir ardent de préserver cet espace public.
Avec détermination, la corporation de développement local de Saint-Léandre, dont Richard D’Auteuil est alors président et Gérald Tremblay, administrateur, s'applique à trouver du financement afin de développer un sentier balisé. Ils seront aidés par Blair Côté, biologiste; François Roy, géologue et Ginette Couture, conseillère en tourisme.
Agence l'Ambassade
Dans leurs démarches auprès d’ingénieurs forestiers, ils découvrent que leurs initiatives permettent également de protéger les habitats ambiants. En effet, c’est d’une protection des coupes forestières de 100 mètres dont bénéficient aujourd’hui les sentiers.
« Nous avions deux buts avec ce projet : permettre aux citoyens de notre coin de pays de découvrir les terres publiques et protéger ce territoire riche en multiressources plus qu’autrement livré à des coupes forestières abusives. »
Depuis plus de 12 ans, Gérald, affilié à la Corporation de développement local de Saint-Léandre, s'affaire à l'amélioration constante des sentiers, notamment par l'installation de balises de signalisation, de tables de pique-nique, de poubelles et autres agréments pour le plus grand plaisir des visiteurs.
Gérald Tremblay
Pour lui, il est primordial de poursuivre le travail entamé par M. Otis et de préserver la mémoire historique du développement du territoire. Mémoire qu'il lègue par l'écriture de livres comme son dernier roman, La Nuit des coyotes, suivi de Les muets de l'Histoire, parus en mai 2021, où il relate le parcours de sa conjointe et lui dans ce retour aux origines gaspésiennes.
Bénévolement, Gérald Tremblay et la Corporation de développement local de Saint-Léandre contribuent à l'entretien des lieux, en plus de s'occuper de la recherche de financement ainsi que des aspects administratifs.
« Chaque année on libère les sentiers des arbres morts, on doit réparer les balises, remplacer les panneaux d'interprétation lorsque nécessaire, s’assurer d’avoir une assurance adéquate en cas d'accident, etc. Depuis ma retraite, je me concentre sur mon écriture et sur la Grotte des Fées. »
Site accessible par chemin forestier à 11 kilomètres du village de Saint-Léandre de Matane, les sentiers de la Grotte des Fées offrent une boucle pédestre d'environ 8 km avec un dénivelé de 215 m, parfait pour les familles et les randonneurs. Généralement considéré comme un parcours facile, il faut en moyenne 2 h pour compléter la boucle. Le moment idéal pour visiter les sentiers est du 15 juin au 15 octobre, afin d’éviter la période de la chasse.
Lieu prisé par la population locale bien avant son aménagement, les sentiers de la Grotte des Fées font partie depuis quelques années du parcours des touristes de passage en Matanie. Parcourir les sentiers de la Grotte des Fées, c'est vivre une aventure écologique.
En partant du stationnement, vous entamerez une descente vers le canyon et sa traverse suspendue de 35 pieds où, si vous avez de la chance, vous pourrez entrevoir un grand héron qui y a élu domicile.
Agence l'Ambassae
Vous pourrez assurément y faire une pause afin d'observer la chute d'une hauteur de 6,5 m qui crée des vapeurs d'eau à travers lesquelles, selon la légende, on peut apercevoir le visage d'une fée, d'où le nom du lieu.
Après le pont autoportant de 50 pieds et l'ascension d'une colline rocheuse, vous arriverez aux crêtes, plateau surplombant la rivière Blanche dont le sol est composé de roches lisses et d'arbres krummholz rappelant la toundra du parc de la Gaspésie. Vous suivrez le ruisseau qui vous guidera vers le belvédère du lac Adèle où vous découvrirez un milieu humide qui vous donnera un point de vue unique sur la faune et la flore typiques de cet environnement.
Vous poursuivrez votre parcours sur le sentier paisible de la cédrière en longeant la rivière Blanche et ses étangs qui vous mèneront tranquillement vers la Grotte des Fées. Dès le début de votre descente vers cet attrait principal, vous pourrez observer 500 millions d'années d'évolution géologique dans les différentes strates de cette paroi rocheuse érodée.
Vous traverserez ensuite un milieu marécageux avant de vous rendre à un plateau d'érablières de toute beauté pour terminer votre boucle qui vous ramènera vers le stationnement. Tout au long de votre parcours, vous pourrez vous arrêter pour lire les panneaux d'interprétation sur la géologie, l’histoire, la flore et la faune de ce lieu enchanteur.
Pour Gérald, protéger la faune et la flore par la création des sentiers, c'est également protéger l'histoire de ce lieu public. En effet, les sentiers La Grotte des Fées reposent sur un site autochtone micmac. « C'est un endroit où il y a un partage des eaux, où les rivières se rencontrent. »
La rivière Blanche coule vers le fleuve, le lac Adèle coule lui vers la Matapédia et finalement, la rivière Petchedetz coule vers Matane. « Les Micmacs parcouraient ces rivières en canot à cette époque. La Grotte des fées était donc un lieu de campement saisonnier. »
Studio du Ruisseau
Ce lieu a également été témoin de plusieurs événements. « On raconte que des hommes, fuyant l’engagement militaire des années de guerre 1939-1945, se seraient cachés à cet endroit. »
Le développement des sentiers de la Grotte s'est fait au fil des années et continue d'évoluer encore aujourd'hui. « Chaque année amène son nouveau projet porteur pour valoriser davantage ces terres et en favoriser l'accès. » Une nouvelle carte des sentiers est disponible au centre touristique du Phare de Matane, aux bureaux de la MRC ainsi qu’au dépanneur de Saint-Léandre.
Quelques plateformes de camping rustique avec toilettes sèches ont également fait leur apparition à la demande des utilisateurs. Beaucoup de projets sont présentement sur la table pour les sentiers de la Grotte des Fées, dont l'installation de potentiels prêt-à-camper.
« Je ne verrai peut-être pas certains de ces projets de mon vivant, mais c'est ça aussi, s'impliquer dans sa communauté. C'est lancer dans le cosmos nos aspirations et léguer de beaux projets à la relève. »